Présentation
Hiver austral est un poème en prose, écrit au futur. Il est composé de trois parties de longueur différentes. Dans un premier temps, le poème raconte la solitude du narrateur face à un immeuble, vu de l’extérieur, dans la ville de São Paulo. Un interlude propose une version alternative : le narrateur est accompagné.  Dans un second temps, le narrateur, désormais à l’intérieur de l’immeuble invoque les stimuli perçus depuis l’appartement, émanant de l’environnement extérieur. La circulation en images et en métaphores, entre l’intérieur et l’extérieur de l’immeuble est évocatrice d’une sensualité retrouvée. Dans un troisième et dernier temps, le texte se réduit à deux phrases, composée d’éléments prélevés dans l’ordre chronologique du poème, dans une synthèse expérimentale de l’ensemble. Cette dernière partie célèbre l’unité que forment cosmos et éros. 

1e partie
 
Par un hiver austral, j’apprendrai qu’un immeuble peut être à lui seul un monde et posséder son propre code postal. Il sera un immeuble connu, dans lequel on aurait plaisir à se promener. Ou bien, il sera une œuvre de fiction, une béance au croisement de grandes avenues, avec sa chaussée brutalisée. Il sera ce que l’on veut bien faire de lui et ce qu’il accepte en retour de devenir pour nous.
 
Je croirai sans doute être venu ici plus de fois. Pourtant cela n’aura fait que quelques années. Quelques années, c’est une façon de tout dire en réduisant beaucoup. C’est une manière de ne pas dire grand-chose. C’est une expression pour rester vague et fuir les questions. C’est ainsi que l’on reste seul. Seul, au milieu de quelque chose. Dans une ville.

Toujours seul.
 
Toujours seul et pour de brefs séjours.
 
En Avril, dans le soleil.
 
En Avril, dans le soleil quand sur les trottoirs accidentés coulent le goutte-à-goutte des climatiseurs.
 
Puis, un jour, baigné par les pluies qui font cesser les fluides internet, je reconnaîtrai des rues déjà traversées, des avenues autrement parcourues, des places souvent gorgées de la vigueur incertaine des énergies inquiètes. Celles, troublées des personnes ici résidentes, ici passantes. Dans une petite voie lactée bruyante entre la Consolaçao et la Place de la République, je retrouverai d’autres lieux reconnus ou vécus. Je penserai à d’autres républiques, à d’autres places et à d’autres pays où nous nous agitons aussi parfois. J’apprendrai que le code postal de l’immeuble est le 01066-900. J’apprendrai que cet immeuble, d’une hauteur de 140 mètres aura été construit entre 1957 et 1966.
Interlude
 
Puis, un jour, en hiver, baignés par les pluies qui font cesser les fluides internet, nous reconnaîtront des rues déjà traversées, des avenues autrement parcourues, des places souvent gorgées de la vigueur incertaine des énergies inquiètes. Celles, troublées des personnes ici résidentes, ici passantes. Dans une petite voie lactée bruyante entre la Consolaçao et la Place de la République, nous retrouveront d’autres lieux reconnus ou vécus. Nous penserons à d’autres républiques, à d’autres places et à d’autres pays où nous nous agitons aussi parfois. Nous apprendrons que le code postal de l’immeuble est le 01066-900. Nous apprendrons que cet immeuble, d’une hauteur de 140 mètres aura été construit entre 1957 et 1966.

à suivre
Paris-Genève-São Paulo, Juin-Juillet 2019

FLORESTA_TMCOPPOLA_2019 / NASA

OSMOSCOSMOS50JPG19.6–25.8.2019